Sigrade, mère de saint Léger, illustre évêque d'Autun et martyr, était honorée comme sainte le quatrième jour du mois d'août, dans l'abbaye des religieuses de Notre-Dame de Soissons. Reléguée dans ce monastère par ordre d'Ebroïn, qui persécutait toute cette noble famille, elle avait vu ses biens confisqués, l'un de ses fils, le comte Guérin, lapidé, et saint Léger soumis aux plus cruelles tortures, en attendant la consommation de son martyre. Adorant dans l'excès du malheur Celui qui l'éprouvait pour la purifier, elle embrassa la vie religieuse à Notre-Dame de Soissons, avec une ferveur qui lui laissa moins sentir ses disgrâces que celles de ses enfants.
Pour la consoler, saint Léger lui adressa, du monastère de Fescamp, une lettre qui est venue jusqu'à nous. C'est un monument précieux de son éloquence et de sa haute piété. Après lui avoir montré les avantages des souffrances par l'autorité des saintes Ecritures, il lui parle de ceux de la vie religieuse. « Nulle langue, lui dit-il, ne peut exprimer la joie que vous devez ressentir dans le Seigneur. Vous avez quitté ce qu'il fallait abandonner. Le Seigneur a exaucé vos prières, il a vu les larmes que vous avez répandues en sa présence. Il vous a retranché ce qui paraissait vous retarder dans la voie du salut, afin que, dégagée des liens qui vous attachaient au monde, vous viviez désormais à Dieu, en goûtant combien le Christ est doux. C'est lui qui est notre Dieu, notre Roi, notre Rédempteur. C'est lui qui est la voie, la vérité et la vie !.. Ô heureuse mort qui donne la vie ! Heureuse perte des biens, qui mérite les richesses éternelles ! Heureuse tristesse, qui procure la joie des anges ! Vous avez déjà éprouve les miséricordes du Seigneur, il vous a inspiré le mépris du monde pour vous faire pratiquer les observances d'une sainte règle. Il a délivré vos enfants des misères du siècle, et leur a donné l'espérance d'une vie éternelle ; au lieu que vous auriez du les pleurer comme morts, si, en mourant, vous les eussiez laissés sur la terre ».
Le reste de la lettre de saint Léger est plein des plus beaux traits de fermeté dans l'affliction, d'amour pour les ennemis, et de détachement des choses créées.
Nous ignorons l'époque de la mort de sainte Sigrade. On conservait ses reliques avec celles de saint Guérin, son fils, à Notre-Dame de Soissons. Un oratoire, situé dans une vallée du Morvan, est dédié à sainte Sigrade.
Sources :
« Sainte Sigrade, veuve et religieuse, mère de saint Léger, évêque d'Autun », dans Paul Guérin, Les Petits Bollandistes : du 24 juillet au 17 août, t. IX, Paris, Bloud et Barral, 1876, p.407 (en ligne : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k30739j/f413.item)